Synopsis du film
Dans un monde post-apocalyptique, The Kid, un orphelin, essaye de survivre. Il entre en guerre contre le chef des terres dévastées, Zeus, qui a enlevé sa nouvelle amie Apple.
Contexte
Turbo Kid est issu d’un court métrage de RKSS intitulé T is for Turbo. Il y avait une envie de conjuguer science-fiction et nostalgie des années 1980 avec un côté ludique « sans prétention » (le film étant à petit budget).
Contenu et modalités propres à la nostalgie
On observe à travers Turbo Kid une nostalgie qui est présentée sous un mode sympathique, voire réconfortant et inspirée par l’univers cinéphilique qu’ont connu les trois créateurs durant les années 1980 (époque de leur enfance). La direction artistique du film est fortement inspirée par les univers des films Mad Max (1979) et de BMX Bandits (1993), mais aussi par l’esthétique de certains cinéastes cultes tels que Sam Raimi, Peter Jackson, John Carpenter, Enzo G. Castellari et aussi par une ambiance qu’on pourrait nommer « cartoons du samedi matin ». Les références aux années 1980 sont nombreuses et prennent tout leur sens grâce à la présence d’objets phares et reconnaissables (baladeur jaune, lunettes View-Master, musique de synth pop). On retrouve aussi une inspiration issue du monde du jeu vidéo (qu’on pense aux jeux Zelda, Megaman ou Contra) dans la forme que prennent les combats et une scénographie qui retient de certains dessins animés d’aventure (Les mystérieuses cités d’or).
Il est intéressant de noter toutefois que les références, très nombreuses, ont une réelle fonction dans l’économie du film :
Oui, pour nous c’était très important que les références servent à l’histoire et ne soient pas utilisées pour simplement « flasher » à l’écran. Dès qu’une référence était présentée pour le facteur « cool » seulement, on la retirait[1].
Comme c’est le cas pour le moyen métrage Kung Fury, Turbo Kid est une lettre d’amour destinée à une enfance révolue, vécue durant les années 1980, d’où l’aspect réconfortant et jubilatoire qui est mis de l’avant au sein du film. On se trouve moins ici dans une nostalgie qui voue un culte aux objets matériels ou à leur résurgence/obsolescence qu’à une nostalgie qui tente de reproduire au mieux une idée du bonheur telle qu’elle peut se vivre dans les yeux d’un enfant des années 1980 (cartoons très énergiques à la Bugs Bunny, émergence des jeux vidéo sur console, culture cinéphilique du vidéoclub, etc.).
La nostalgie se fait d’ailleurs sentir jusque dans le casting, les créateurs admettant avoir choisi l’acteur Michael Ironside car il représente « le méchant par excellence des années 1980[2] ».
Whissell, Whissell et Simard ont ainsi une manière de faire de la nostalgie une voie vers l’authenticité, et cela est dû principalement au peu de moyens de la production, qui force à une honnêteté globale (en ce qui a trait aux décors, au côté assumé de l’aspect « cheap » et au propos sur la désertification des lieux en milieu post-apocalyptique). Le « peu de moyens » devient ici une voie pour se rapprocher, esthétiquement parlant, d’une époque où les moyens étaient eux-mêmes beaucoup moins impressionnants, les explosions et les effets spéciaux sci-fi à la fois un peu ridicules et sympathiques, en rétrospective, justement pour cela.
La nostalgie surgit ici dans sa version la plus cartoonesque, et selon les codes d’une régression aux accents enfantins qui s’autolégitime et se proclame comme telle (et qui a eu pour effet de conférer à Turbo Kid un certain statut culte dans le monde du cinéma de genre et du cinéma de science-fiction québécois).
N’y a-t-il pas ainsi une volonté de transgression qui passe par cette forme de régression joyeuse, se situant à des lieux d’une nostalgie qu’on pourrait confondre avec de la mélancolie?
Car avec ses allures de Grindhouse outrageant, Turbo Kid se révèle un vrai sale gosse, transgressant une nouvelle fois joyeusement la rigidité morale des films des années 1980. Une désobéissance habile qui trouve son paroxysme avec cette image de Turbo Kid et d’Apple se réfugiant d’une pluie de sang et d’entrailles sous un parapluie[3].
Réception
Leur enthousiasme n’a d’égal que leur générosité et leur charisme. Ils perpétuent l’art du old school et attachent une réelle attention à tous les aspects du métier. Ils ont réussi à créer un univers qui leur est propre. Les hommages et les emprunts font partie intégrante de leur œuvre, mais ils traitent ceux-ci avec une signature indéniable, un amour palpable de l’artisanat du cinéma et un sens inné du métissage des genres et des références croisées.
« Une entrevue avec le collectif RKSS – Turbo Kid », 22 mai 2020, https://ctvm.info/une-entrevue-avec-le-collectif-rkss-turbo-kid-par-marc-lamothe/.
Notes
[1] Voir Thomas Destouches, « Interview – Anouck Whissell, Yoann-Karl Whissell et François Simard : Turbo Kid est une lettre d’amour à notre enfance », 28 décembre 2016, https://filmsetseriesduquebec.wordpress.com/2016/12/28/interview-anouk-whissell-yoann-karl-whissell-francois-simard-turbo-kid-est-une-lettre-damour-a-notre-enfance/.
[2] Ibid.
[3] Thomas Destouches, « Critique film : Turbo Kid d’Anouck Whissell, François Simard et Yoann-Karl Whissell (2015) », 20 février 2016, https://filmsetseriesduquebec.wordpress.com/2016/02/20/critique-film-turbo-kid-danouk-whissell-francois-simard-et-yoann-karl-whissell-2015/.